Ruptures et contraintes dans les colonnes
Le calcul de la contrainte maximale admissible consiste d'abord à déterminer la contrainte verticale de rupture « qr » d'une colonne isolée à partir des caractéristiques des colonnes et du sol après traitement et ce selon les schémas de rupture possibles suivants (Fig. I.10) ( Aguado et al. 2011[1]) :
Rupture par expansion latérale (critère souvent dimensionnant) (Fig. I.10a) ;
Rupture par cisaillement généralisé (rupture rare, cas des colonnes courtes) (Fig. I.10b) ;
Rupture par poinçonnement (colonnes flottantes) (Fig. I.10c).
a) Rupture par expansion latérale
Selon la méthode de Greenwood (1970) et, par analogie aux conditions triaxiales, la contrainte de rupture effective « qre » par expansion latérale est donnée en fonction de la profondeur et de la contrainte radiale « σr » par:
qre = σr . tan2(π/4 + φ'c /2) ................... (I.10)
La valeur de l'étreinte radiale résulte du contexte géotechnique ; cette valeur est estimée à partir d'essais de laboratoire (essais triaxiaux) ou d'essais in situ (pressiomètre, pénétromètre statique, scissomètre) lors de l'étude d'un projet géotechnique.
Remarque :
Dans le cas du pressiomètre, la contrainte radiale « σr » est estimée de la façon suivante par couche de sol :
σr = Ple* ............... (Ple* est la pression limite nette équivalente)
Si en outre on a « φ'c = 38°», l'équation (I.10) devient :
qre = 4 . Ple* .................. (I.11)
Où « Ple* » est la pression limite nette équivalente.
Dans le cas du pénétromètre statique, la contrainte radiale « σr » est estimée de la façon suivante par couche de sol :
σr = qce /3 .......................... (I.12)
Si en outre on a « φ'c = 38°», l'équation (I.10) devient :
qre = 4/3 . qce ..................... (I.13)
Où « qce » est la résistance de pointe équivalente calculée sur la hauteur de colonne dans chaque couche selon la formule suivante :
qce = min (qce, suivant la hauteur [z]) .................. (I.14)
Avec « qce[z] » calculée suivant la formule ci-dessous :
qce [z] = ∫_(z-D)(z+D)〖qc (z)dz où D= ∅CB 〗........... (I.15)
b) Rupture par cisaillement généralisé
La rupture par cisaillement généralisé peut être étudiée lorsque les caractéristiques de la colonne sont relativement proches de celles du sol. Ce cas est peu fréquent, et le calcul correspondant n'est pas présenté ici (Soyez, 1985).
c) Rupture par poinçonnement
La contrainte verticale régnant au sein de la colonne est maximale en tête de la colonne et décroît en fonction de la profondeur (Soyez, 1985).
Dans un milieu homogène (une seule couche) caractérisé par la cohésion non drainée « Cu », la contrainte verticale de rupture vis-à-vis du poinçonnement de la base de la colonne est égale à 9.Cu. On définit alors une contrainte maximale en tête « qrp » selon la formule suivante:
qrp = 9 . Cu + Lc . (2 . Cu / Rc - γc) ........................(I.16)
Où :
γc : poids volumique de la colonne ;
Lc : longueur de la colonne ;
Rc : rayon moyen de la colonne.
En pratique, on élimine le risque de poinçonnement en donnant à la colonne une longueur supérieure à la valeur minimale qui équilibre la résistance du sol :
a/- Sous sollicitations ELU (état limite ultime ou de rupture):
Lc ≥ Rc . [(γELU . σ0ELU / Cu) – 9]/2 ............... (I.17)
b/- Sous sollicitations ELS (état limite de service):
Lc ≥ Rc . [(γELS . σ0ELS / Cu) – 9]/2 ............... (I.18)
Où:
σ0 est la contrainte en tête de colonne ;
Avec :
γELU = 1,5
γELS = 2
Dans le cas d'un milieu hétérogène (multicouche), la formule (I.16) devient :
qrp = 9 . Cup + Lc (2 . Cum / Rc - γc) .............. (I.19)
Où :
Cup est la cohésion du sol à la base de la colonne ;
Cum est la cohésion moyenne du sol sur la hauteur de la colonne.
Remarque :
Les valeurs de cohésion (Cu, Cup et Cum) résultent du contexte géotechnique ; elles sont estimées à partir d'essais de laboratoire (essais triaxiaux) ou d'essais in situ (pressiomètre, pénétromètre statique, scissomètre, ...) lors de l'étude de projet géotechnique.
Dans le cas du pressiomètre, on pourra retenir par exemple :
a/- Si : Pl* < 0.3 MPa
Cu = Pl*/5,5 (en MPa) ..................................... (I.20)
b/- Si Pl* ≥ 0.3 MPa
Cu = Pl*/10 + 0,025 (en MPa) ........................ (I.21)
Dans le cas du pénétromètre statique, on pourra retenir par exemple :
Cu = (qc - po) /15 ............................................. (I.22)
Où « p0 = σvt = σv' + µ» est la contrainte verticale totale au niveau considéré; σv' est la contrainte verticale effective au niveau considéré; µ est la pression interstitielle au niveau considéré et qc est la résistance à la pointe.
Sous semelle, les colonnes sont toujours non flottantes au sens du critère ci-après. On considère qu'une colonne n'est pas flottante quand elle s'arrête dans un horizon caractérisé par Cup supérieure ou égale à 150 kPa (soit environ Pl* ≥ 0,8 MPa ou qc ≥ 2,5 MPa) ou tel que 9.Cup > qr.
Dans tous les cas, il est nécessaire de calculer et de prendre en compte le tassement sous les colonnes.
d) Contrainte verticale de rupture « qr »
La contrainte verticale de rupture « qr » dans la colonne est égale à :
qr = min (qre ; qrp ; 1.6 MPa) .............................. (I.23)
e) Contrainte verticale admissible à l'ELS « qaELS »
A l'ELS, la contrainte verticale admissible « qaELS » dans la colonne est obtenue par application d'un coefficient de sécurité de « Fs = 2 » sur la contrainte verticale de rupture qr :
qaELS = qr /2 = min (qre/2 ; qrp/2 ; 0.8 MPa) .................... (I.24)
f) Contrainte verticale maximale à l'ELU« qaELU »
A l'ELU, la contrainte verticale maximale (ultime) « qaELU » dans la colonne est obtenue par application d'un coefficient de sécurité de « Fs = 1.5 » sur la contrainte verticale de rupture qr :
qaELU = qr /1,5 = min (qre/1,5 ; qrp/1,5 ; 1,06 MPa) ....................... (I.25)
Remarque :
Les deux équations (I.24) et (I.25) [qr = 2.qaELS = 1.5.qaELU] permettent d'affecter un coefficient sécurité de « Fs = 1.33 » à la contrainte admissible à l'ELS :
qaELU = 1.33.qaELS ......................... (I.26)